Pas de sanction disciplinaire plus lourde en appel
Une récente décision du Conseil d’Etat est venue préciser la portée des sanctions disciplinaires pouvant être infligées à l’agent public dans le cadre d’une procédure d’appel engagée par ce dernier : CE, 6 avril 2022, req. n°438057
Les faits à l’origine de cette décision du Conseil d’Etat en matière de discipline des agents de l’enseignement supérieur et de la recherche :
À l’origine de cette décision, un Maître de Conférences de l’Université de Nice-Sophia-Antipolis s’était vu infligé par la section disciplinaire du conseil académique de l’Université et sur le fondement de l’article L. 952-8 du code de l’éducation une sanction portant l’interdiction d’exercice des fonctions de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur pendant une durée de cinq ans avec privation de la moitié du traitement.
L’agent a interjeté appel de cette sanction disciplinaire auprès du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Le CNESER a annulé cette décision et infligé une sanction de l’interdiction d’exercer toute fonction d’enseignement supérieur pendant une durée de trois ans, avec privation de la totalité du traitement.
Cette sanction a donc été aggravée en appel puisque si l’agent a vu son interdiction d’exercer ses fonctions réduite de cinq à trois ans, le CNESER l’a néanmoins privé de tout traitement.
Le rappel des principes généraux du droit disciplinaire par le Conseil d’Etat :
Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’Etat a précisé dans sa décision rendue le 6 avril 2022 n°438057 :
« qu’Il résulte des principes généraux du droit disciplinaire qu’une sanction infligée en première instance par une juridiction disciplinaire ne peut être aggravée par le juge d’appel, lorsqu’il n’est régulièrement saisi que du recours de la personne frappée par la sanction (…)
Ainsi, une sanction disciplinaire prise à l’encontre d’un agent de l’enseignement supérieur et de la recherche ne peut être aggravée en appel lorsque le juge d’appel (en l’occurence le CNESER) statue sur l’appel interjeté uniquement par l’agent (l’agent, l’Université et le Ministère peuvent interjeter appel d’une sanction disciplinaire infligée par le Conseil académique de l’Université).
Ce principe avait déjà été dégagé par la jurisprudence administrative dans une décision datant de 2013 (CE, 17 juillet 2013, n° 362481).
L’aggravation d’un seul élément de la sanction suffit à caractériser l’aggravation de la sanction :
Dans cette affaire, l’article L 952-8 du code de l’éducation précise les sanctions susceptibles d’être infligées à l’agent public de l’enseignement supérieur et de la recherche et les éléments devant être pris en compte : « la nature et (…) l’étendue des fonctions dont l’exercice est interdit, {le} périmètre de l’interdiction d’exercice, (…) la durée de celle-ci et à l’étendue de la privation de traitement« . Le Conseil d’Etat considère qu’ « Une sanction prononcée sur ce fondement {doit} être regardée comme aggravée lorsque l’un de ces éléments {est} aggravé« .
Ainsi, le CNESER en modifiant l’interdiction de traitement infligée à l’agent public a aggravé la sanction disciplinaire.
La décision du CNESER est donc annulée par le Conseil d’Etat.
Que retenir de cette décision du Conseil d’Etat en matière disciplinaire ?
Si cette décision réaffirme les principes généraux du droit disciplinaire, il conviendra aux établissements d’enseignement supérieur d’être particulièrement vigilants en cas d’appel de l’agent devant le CNESER. Un appel incident peut être interjeté par l’établissement afin d’amener le juge d’appel a statuer à nouveau sur l’ensemble de la sanction.
En ce qui concerne l’agent public, celui-ci devra analyser de manière précise l’opportunité d’introduire un appel devant le CNESER. L’assistance d’un avocat en droit de l’éducation et en droit de la recherche peut s’avérer utile à la défense de l’agent.
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