Responsabilité dans l’organisation des études – Jurisprudence
La Cour administrative d’appel de Marseille vient de condamner l’IEP d’Aix-en-Provence à verser 5.000€ à l’étudiante victime des fautes de l’institut commises dans l’organisation de ses études.
CAA Marseille, 6e ch. – formation à 3, 27 février 2023, req. n° 21MA00604
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En première instance, l’étudiante a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l’Institut d’études politiques (IEP) d’Aix-en-Provence à lui verser la somme de 108 000 euros, assortie des intérêts au taux légal capitalisés à compter du 21 septembre 2018 en réparation des préjudices qu’elle estime avoir subis du fait notamment de l’organisation défectueuse de sa soutenance de mémoire.
le tribunal administratif a rejeté cette demande. L’étudiante a interjeté appel de ce jugement.
L’absence de publication d’un règlement des formations constitue une carence fautive :
La Cour juge que le tribunal administratif a relevé a bon droit que l’absence de publication du règlement des études par l’IEP constitue une carence fautive et que les circonstances exceptionnelles invoquées par l’IEP pour s’exonérer de cette obligation (agissements du directeur, résiliation de la convention) ne sont pas fondées :
« En vertu de l’article 4 de la convention de partenariat conclue entre l’UWG et l’IEP le 12 octobre 2013, pour l’admission, le programme, les modalités d’examen et la durée, il était renvoyé à un règlement des formations. Or, ainsi que l’a à bon droit relevé le tribunal, l’IEP ne justifie pas avoir adopté un tel règlement des formations. Cette carence est constitutive d’une faute dans l’organisation des études de nature à engager la responsabilité de l’IEP. Ce dernier n’est à cet égard pas fondé à soutenir qu’aucun texte n’imposerait la rédaction d’un tel règlement alors que la convention de partenariat renvoyait explicitement à ce règlement des formations.
Contrairement à ce que soutient l’IEP, ni les agissements de son directeur à l’époque, ni le fait que la résiliation de la convention de partenariat n’ait pas prévu de période transitoire ne sont de nature à caractériser l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant qu’un tel règlement des formations n’ait pas été antérieurement adopté. Par suite, l’IEP n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont estimé qu’en s’abstenant d’adopter ce règlement des formations, il avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. »
La reconnaissance des fautes commises lors du dépôt du mémoire de l’étudiante et dans l’organisation de la soutenance :
Après avoir relevé la carence fautive, la cour va revenir sur les fautes commises par l’IEP dans l’organisation de l’épreuve du mémoire imposée à l’étudiante. Les juges vont retenir que l’IEP est responsable de fautes commises lors du dépôt et de la soutenance du mémoire. L’étudiante sera indemnisée pour les fautes commises par l’université sur ce point :
« Il résulte des échanges versés au dossier que l’intéressée a dans un premier temps été informée, par courriel du 1er décembre 2014 de l’UWG, que la soutenance de son mémoire se tiendrait en visioconférence le 4 décembre 2014, les horaires restant à préciser. Mais, par courriel du 4 décembre 2014, l’UWG lui indiquait finalement que l’IEP prendrait contact avec elle pour convenir d’une date de soutenance. C’est seulement par courriel du jeudi 11 décembre 2014 adressé à 21 heures 34 que Mme A a été informée que sa soutenance se déroulerait finalement en visioconférence le samedi 13 décembre 2014 à 17 heures 30. Ainsi que le relève la requérante, la circonstance que les informations auraient été affichées dans les locaux de l’IEP d’Aix-en-Provence ne saurait lui être opposée alors que la convention de partenariat stipulait à l’article 4 que sa formation se déroulait à Genève.
L’IEP ne peut à cet égard se prévaloir de ce que le mémoire de soutenance de Mme A aurait été déposé au-delà de la date limite fixée au 28 novembre 2014. En effet, il résulte de l’instruction que, conformément à l’article 4 de la convention de partenariat conclue avec l’IEP, l’UWG avait dès le mois de novembre informé Mme A du calendrier global des épreuves, la date de dépôt de son mémoire devant intervenir avant le 28 novembre 2014 et celle de sa soutenance avant le 12 décembre 2014. Mme A justifie avoir adressé son mémoire par courriel le 25 novembre 2014 à l’adresse mail qui lui a été communiquée par courriel du même jour et qui rappelait encore que le dernier délai de remise des manuscrits était le 28 novembre 2014. Si Mme A a ensuite déposé son mémoire sur la plateforme dédiée à cet effet seulement début décembre 2014, l’IEP ne justifie toutefois pas que ce dépôt via la plateforme dédiée aurait été imposé avant le 28 novembre 2014.
Dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que l’IEP a commis une faute dans l’organisation de sa soutenance de mémoire. »
L’information tardive de l’étudiant est une faute :
L’IEP est sanctionné pour ne pas avoir communiqué dans un délai normal les résultats et les appréciations du jury à l’étudiante :
« Il résulte de l’instruction que, malgré ses nombreuses relances depuis 2015, c’est seulement le 8 février 2018, soit plusieurs années plus tard, que le conseil de Mme A a été informé par l’IEP de sa note de soutenance et s’est vu communiquer la notice de soutenance comportant les appréciations du jury. Ce délai, qui apparaît anormalement long est de nature à caractériser une faute de l’IEP. »
La cour indemnise le préjudice moral causé par les fautes commises par l’IEP :
‘En cinquième et dernier lieu, la requérante est en revanche fondée à soutenir que l’absence d’adoption d’un règlement des formations, l’organisation défaillante de sa soutenance de mémoire et la tardiveté de l’information de son ajournement lui ont causé un préjudice moral, dont il sera fait une juste appréciation en lui accordant une somme de 5 000 euros. »
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