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Mesures conservatoires contre un PU-PH : Compétence du TA

Mesures conservatoires à l’encontre d’un Professeur des universités et Praticien hospitalier : Compétence du TA

Dans une ordonnance du 8 mars 2024, le Conseil d’État a rejeté la requête de M. A, agent hospitalier et universitaire suspendu à titre conservatoire par l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) et l’université Paris-Est Créteil. M. A contestait la légalité de cette suspension, soutenant notamment l’incompétence des autorités ayant prononcé la mesure et l’atteinte à sa situation professionnelle et financière. Le Conseil d’État a toutefois jugé que sa demande de suspension ne relevait pas de sa compétence directe et a rejeté la requête.

Il s’agit ici d’un revirement d’une jurisprudence ancienne qui confiait au Conseil d’Etat le soin d’apprécier l’ensemble des mesures prises à l’encontre d’un Professeur des universités (compétence tirée du fait que les professeurs d’université sont nommés par décret du Président de la République).

CE, 8 mars 2024, n° 492342

Les circonstances de la suspension du professeur des universités

M. A a sollicité la suspension de l’arrêté du 4 janvier 2024, qui prononçait, à titre conservatoire, sa mise à l’écart de ses fonctions hospitalières et universitaires. Cette suspension, selon M. A, portait atteinte à sa réputation et à ses compétences professionnelles, l’empêchant de poursuivre ses activités.

Le requérant a invoqué plusieurs arguments pour contester cette décision :

  • Incompétence de l’autorité décisionnaire : M. A a fait valoir que ni le directeur de l’AP-HP ni le président de l’université n’étaient habilités à prononcer une telle suspension sans l’intervention des ministres compétents.
  • Vice de procédure : L’absence de consultation des ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur avant la prise de la décision a également été relevée.
  • Erreur de qualification juridique : M. A a contesté les motifs de sa suspension, soutenant que les faits reprochés n’avaient ni la gravité ni le caractère d’urgence requis pour justifier une suspension conservatoire.

L’Analyse du Conseil d’État

Le Conseil d’État a rappelé que sa compétence directe est limitée aux litiges concernant la discipline des agents publics nommés par décret présidentiel et aux suspensions prises par les ministres compétents en vertu du décret du 13 décembre 2021 relatif au personnel enseignant et hospitalier. Dans le cas présent, la suspension de M. A a été décidée par le directeur de l’AP-HP et le président de l’université, conformément aux dispositions dérogatoires de l’article 26 du décret, qui permettent aux autorités locales de prononcer une suspension en cas de circonstances exceptionnelles mettant en péril la continuité du service et la sécurité des patients ou des étudiants.

Le Conseil d’État a estimé que cette suspension conservatoire n’était pas une mesure disciplinaire, mais une décision relevant de l’autorité de gestion des responsables d’établissement. Par conséquent, la contestation de M. A échappait aux litiges relevant de la compétence directe du Conseil d’État :

« Aux termes de ces dispositions, par dérogation à la suspension d’un agent qui fait l’objet d’une procédure disciplinaire ou d’une procédure pour insuffisance professionnelle, prévue au I de cet article, que les ministres chargés de l’enseignement supérieur et de la santé peuvent prendre lorsque l’intérêt du service l’exige, le directeur général du centre hospitalier universitaire et le président de l’université concernée peuvent décider conjointement de suspendre les activités de l’agent concerné, dans des circonstances exceptionnelles où sont mises en péril la continuité du service et la sécurité des patients ou celle des étudiants. Une telle mesure ne se rattache pas à la procédure disciplinaire mais procède de l’autorité que détiennent le directeur d’un établissement hospitalier et le président d’un établissement universitaire sur l’ensemble du personnel de leurs établissements. Elle ne constitue pas une sanction disciplinaire, de sorte que sa contestation ne soulevant pas un litige concernant la discipline, elle ne relève pas de la compétence directe du Conseil d’Etat prévue dans les cas que vise l’article R. 311-1 du code de justice administrative.

Il résulte de ce qui précède que la requête présentée par M. A n’est manifestement pas au nombre de celles dont il appartient au Conseil d’Etat d’en connaître. Elle ne peut qu’être rejetée selon la procédure prévue par l’article L. 522-3 du code de justice administrative. »

Le rejet de la requête

Le Conseil d’État a jugé que la requête de M. A n’entrait pas dans son champ de compétence et l’a rejetée sans audience ni instruction, en vertu de la procédure simplifiée de l’article L. 522-3 du code de justice administrative. Cette décision souligne la spécificité des compétences juridictionnelles en matière de gestion du personnel hospitalier et universitaire, rappelant que les mesures conservatoires peuvent être prises en dehors du cadre disciplinaire, notamment pour des raisons de continuité et de sécurité des services.

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