Annulation de l’ajournement d’une candidate au CAP Pâtissier pour irrégularités
Le tribunal administratif de Rennes a, par un jugement du 7 novembre 2024, annulé la délibération du jury du CAP spécialité « Pâtissier » qui avait prononcé l’ajournement d’une étudiante pour la session de juin 2022. Cette décision intervient après que la candidate a soulevé plusieurs irrégularités dans le processus d’évaluation de l’épreuve EP1, notamment des biais dans la composition du jury, des erreurs de notation, et des manquements quant aux aménagements auxquels elle avait droit en raison de son handicap.
TA Rennes, 3e ch., 7 novembre 2024, n° 2205299.
Le tribunal a d’abord rappelé le principe de souveraineté du jury qui s’applique en cas de contestation d’une délibération :
« En application du principe de la souveraineté du jury, ni l’appréciation portée par un jury d’un concours ou d’un examen sur la valeur des prestations des candidats, ni les principes de correction retenus par le jury, ne sont susceptibles d’être contestés devant le juge administratif, sauf si cette appréciation est fondée sur une erreur de droit ou sur des faits matériellement inexacts. »
Il a ensuite examiné les notes et les mentions attribuées à Mme B, constatant une incohérence entre la note finale et les évaluations détaillées. Le tribunal retient qu’elle a reçu de bonnes mentions pour l’approvisionnement, le stockage, et l’organisation de son travail, et aucune mention de débutant ne figurait dans sa grille d’évaluation. En revanche, le jury a justifié la faible note globale par des commentaires généraux, tels que « aucune maîtrise dans le travail des pâtes feuilletées », qui ne semblaient pas alignés avec les évaluations spécifiques obtenues par Mme B.
Le tribunal a jugé que cette incohérence constituait une erreur manifeste d’appréciation, rendant ainsi la décision de la commission d’évaluation non conforme aux critères de l’arrêté du 6 mars 2019 relatif à la spécialité « Pâtissier » :
« Or, pour évaluer l’épreuve à laquelle Mme B s’est soumise, la commission d’évaluation lui a attribué pour l’approvisionnement et le stockage, une mention » EXE « et une mention » EXC « , pour l’organisation du travail selon les consignes données, trois mentions » EXE « , quatre mentions » OPE « et une mention » EXC « , et pour l’élaboration de produits finis ou semi-finis à base de pâtes, huit mentions » EXE « et six mentions » OPE « . Ainsi que l’intéressée le fait valoir, pour aucun de ces 24 critères, la commission d’évaluation a considéré qu’elle était débutante. En outre, elle n’a pas commis de manquements aux règles d’hygiène, puisque ce critère a été considéré comme d’une maîtrise excellente. Au regard des éléments ainsi évalués, le seul commentaire littéral porté par la commission d’évaluation, avec la formulation : » aucune maîtrise dans le travail des pâtes feuilletées – manque de rigueur dans la gestion du poste de travail « , qui ne correspond pas même à l’évaluation faite du seul critère C3.6 » Elaborer une pâte feuilletée, tourer, détailler et mettre en forme « qui a obtenu la mention » EXE « ou encore aux appréciations portées sur l’organisation du travail, ne saurait permettre de justifier la note de 5 sur 20 qui a été attribuée à la candidate pour l’ensemble de l’épreuve. En défense, le recteur de l’académie de Rennes se contente de faire état de notes assez basses attribuées par le jury au titre de la session d’examens de juin 2022, en comparaison avec celles attribuées l’année précédente, sans précision sur les modalités de transcriptions numériques des mentions permettant d’évaluer chacun des critères appréciés par la commission d’évaluation. Aussi, au regard des pièces produites, Mme B est fondée à soutenir que la note sanctionnant l’épreuve professionnelle EP1 du CAP spécialité » Pâtissier « , qu’elle a passée en juin 2022, a été fixée en méconnaissance du règlement d’examen. »
Ordre de réexamen par un jury différent
En raison de ces irrégularités, le tribunal a annulé la délibération du jury du 8 juillet 2022 ainsi que la décision du recteur de l’académie de Rennes rejetant le recours gracieux de Mme B. Il a enjoint au recteur d’organiser une nouvelle réunion du jury pour réexaminer la situation de Mme B ou, à défaut, de lui permettre de repasser l’épreuve EP1 dans des conditions d’évaluation conformes, en veillant à une composition indépendante du jury.
Respect des procédures applicables au CAP Pâtissier
Cette décision souligne la vigilance des juridictions administratives quant à l’équité des procédures d’évaluation dans les examens professionnels. Elle rappelle que les établissements d’enseignement et les autorités académiques ont l’obligation de garantir des évaluations justes, impartiales, et adaptées aux besoins spécifiques des candidats, en particulier pour les personnes bénéficiant d’aménagements en raison de handicaps.
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