Rejet de la demande d’accréditation d’une association d’enseignement : insuffisance de motivation et réexamen ordonné
La Cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé la décision de la ministre de la Culture rejetant la demande d’accréditation de l’association Théâtre Ecole d’Aquitaine pour l’année universitaire 2019-2020. Ce jugement, qui se fonde sur un défaut de motivation, met en lumière l’exigence de justifications précises pour les décisions administratives individuelles défavorables en matière d’établissement d’enseignement privé.
CAA Bordeaux, 1re ch. – formation à 3, 31 octobre 2024, n° 22BX00723.
L’accréditation pour délivrer un diplôme national supérieur professionnel de comédien contestée
L’association Théâtre Ecole d’Aquitaine, dont l’objet est l’enseignement de l’art dramatique et la formation de comédiens, avait obtenu une première autorisation en 2016 pour délivrer un diplôme national supérieur professionnel de comédien. En vue de renouveler cette accréditation pour la rentrée universitaire 2019/2020, un groupe d’experts a visité l’établissement en 2018 et émis des recommandations dans un rapport. Malgré les ajustements réalisés, le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels a rendu un avis défavorable. Suivant cet avis, la ministre de la Culture a refusé le renouvellement de l’accréditation le 9 juillet 2019. Cette décision a ensuite été confirmée malgré des recours gracieux et hiérarchiques de la part de l’établissement d’enseignement privé.
Le refus d’accréditation de l’établissement d’enseignement privé insuffisamment motivé
La Cour a souligné que la décision du 9 juillet 2019 devait être motivée en vertu de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration. Ce texte précise que :
« Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. »
Le code exige que les décisions de refus d’un avantage, comme une accréditation, soient motivées lorsqu’elles concernent des droits dont l’obtention est conditionnée au respect de certaines exigences légales. La décision de la ministre se contentant de faire référence à l’avis défavorable du Conseil, sans détailler les raisons juridiques et factuelles de ce rejet, a été jugée insuffisamment motivée, et donc irrégulière au regard des obligations imposées par le code des relations entre le public et l’administration :
« La décision contestée du 9 juillet 2019, qui refuse un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir, est au nombre des décisions administratives individuelles défavorables qui doivent être motivées en application des dispositions précitées du code des relations entre le public et l’administration. Or, cette décision, qui se borne à faire référence à l’avis défavorable du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche artistiques et culturels en date du 25 juin 2019, est dépourvue de toute motivation en droit. Par suite, l’association Théâtre Ecole d’Aquitaine est fondée à soutenir que la décision en litige est insuffisamment motivée au regard des dispositions précitées du code des relations entre le public et l’administration. »
Obligation de réexamen de la demande
La Cour a ordonné le réexamen de la demande de l’association, estimant que cette annulation impliquait une nouvelle analyse du dossier, cette fois en respectant l’obligation de motivation. En conséquence, la ministre de la Culture doit procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’arrêt.
Enjeux de la décision pour les établissements d’enseignement privés et l’Administration
Cette décision souligne l’importance pour l’administration de justifier ses décisions défavorables, particulièrement dans des secteurs où les autorisations et accréditations sont indispensables pour le bon fonctionnement des institutions. En invalidant la décision de la ministre de la Culture pour défaut de motivation, la Cour rappelle les exigences strictes du code des relations entre le public et l’administration en matière de transparence et de droits des administrés à une décision explicitement motivée.
Cette affaire constitue un rappel pour les institutions publiques de l’obligation de transparence et de rigueur dans la motivation des décisions, notamment dans les domaines artistiques où l’accréditation est cruciale pour la survie des structures de formation.
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