Le 1er septembre 2025, le tribunal administratif de Montpellier a rendu une décision particulièrement importante pour la reconnaissance des droits des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) exerçant au sein d’un établissement relavant du réseau d’éducation prioritaire (REP et REP+). Cette décision précise le régime de la prime REP – REP+.
TA Montpellier, 1er sept. 2025, n° 2501980. Lire en ligne
Les faits et la procédure – L’AESH ne bénéficiait pas de la prime REP+
Mme A, recrutée en octobre 2022 en qualité d’AESH, était affectée dans un établissement classé en réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+). Constatant qu’elle ne percevait pas l’indemnité de sujétions accordée aux personnels enseignants et assimilés exerçant dans ces établissements, elle a formé une demande auprès de la directrice académique des services de l’éducation nationale (DASEN) des Pyrénées-Orientales.
Par une décision du 24 janvier 2025, cette dernière a rejeté sa demande, au motif que les AESH ne figuraient pas parmi les catégories de personnels éligibles à cette prime. Mme A a alors saisi le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de ce refus, le versement de l’indemnité due depuis son recrutement ainsi que les intérêts au taux légal.
Le syndicat Sud éducation Hérault est intervenu volontairement à l’instance pour soutenir les conclusions de la requérante.
Les arguments de la requérante
Mme A soutenait principalement :
- que la décision contestée était signée par une autorité incompétente et insuffisamment motivée ;
- qu’elle était entachée d’une erreur de droit, dès lors qu’elle exerçait dans un établissement relevant du dispositif REP+ ;
- qu’elle méconnaissait le principe d’égalité de traitement entre agents publics, les AESH étant soumis aux mêmes contraintes que les autres personnels bénéficiaires.
L’analyse du tribunal
Le tribunal a replacé l’affaire dans le contexte de la jurisprudence récente du Conseil d’État (décision n° 500427 du 16 juillet 2025), qui avait déjà clarifié le régime applicable à l’indemnité de sujétions dans les établissements REP et REP+.
Il a rappelé que :
- Le décret du 28 août 2015 institue une indemnité spécifique de sujétions pour les personnels enseignants, d’éducation, de direction, ainsi que pour certaines catégories administratives et de santé exerçant en REP et REP+.
- Le décret du 29 août 2016 précise que les agents contractuels exerçant ces mêmes fonctions bénéficient également de l’indemnité, dans les mêmes conditions que les titulaires.
- Les AESH, en vertu du code de l’éducation et des textes qui encadrent leurs missions, appartiennent pleinement à la communauté éducative : ils participent à la scolarisation des élèves, assurent leur inclusion, favorisent leur autonomie et contribuent au projet pédagogique de l’établissement.
En conséquence, le tribunal a estimé que les AESH exerçant dans des établissements REP ou REP+ sont soumis aux mêmes sujétions particulières que les autres personnels bénéficiaires de la prime. Leur exclusion du dispositif, fondée uniquement sur leur statut, constitue donc une atteinte au principe d’égalité.
Le dispositif de la décision
Le tribunal a :
- admis l’intervention du syndicat Sud éducation Hérault ;
- annulé la décision de refus de la DASEN des Pyrénées-Orientales ;
- enjoint à la rectrice de l’académie de Montpellier de verser à Mme A l’indemnité de sujétions due depuis le 1er octobre 2022, dans un délai de trois mois, avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable.
En revanche, la demande de capitalisation des intérêts a été rejetée, une année entière d’intérêts n’étant pas encore due.
« Eu égard à la nature de leurs missions et aux conditions d’exercice de leurs fonctions, les accompagnants des élèves en situation de handicap exerçant dans les écoles ou établissements relevant des programmes REP+ et REP sont exposés à des sujétions comparables à celles des personnels titulaires et contractuels bénéficiant de l’indemnité de sujétions en application des décrets du 28 août 2015 et du 29 août 2016. Ils participent en outre à l’engagement professionnel collectif de ces équipes. Les circonstances tenant à la particularité de leur statut et à leurs conditions de recrutement ne sont pas de nature, étant donné l’objet de l’indemnité instituée par le décret du 28 août 2015, à justifier de les exclure du bénéfice de cette indemnité.
Par suite, le pouvoir réglementaire, en excluant les accompagnants des élèves en situation de handicap des catégories de personnel bénéficiant de l’indemnité de sujétions, a créé une différence de traitement sans rapport avec l’objet du texte qui institue cette indemnité et a méconnu le principe d’égalité.
Il résulte de ce qui précède que la requérante, sans qu’il soit utile de se prononcer sur ses autres moyens, est fondée à demander l’annulation de la décision attaquée. » jugement prononcé
La portée de cette décision
Par cette décision, le tribunal administratif de Montpellier consacre l’égalité de traitement entre les AESH et les autres personnels exerçant en REP+. Il confirme que la spécificité de leur statut ne peut justifier leur exclusion du bénéfice d’une prime qui vise précisément à compenser les conditions d’exercice difficiles et à renforcer la stabilité des équipes éducatives.
Cette décision ouvre des perspectives importantes pour l’ensemble des AESH affectés en éducation prioritaire, qui pourraient désormais invoquer ce principe d’égalité pour réclamer, eux aussi, l’indemnité de sujétions. Elle marque une étape supplémentaire dans la reconnaissance des droits de ces personnels essentiels à l’inclusion scolaire.
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