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Accès au master et projet professionnel : pas de suspension sans preuve d’atteinte grave et immédiate

Rentrée en M1 et liste d’attente lointaine : la suspension refusée par le TA de Versailles

Le 10 septembre 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande d’une étudiante tendant à suspendre la décision du 17 juillet 2025 par laquelle l’Université Paris-Saclay a refusé sa candidature en première année de master – mention Droit privé.

La requérante sollicitait en outre une inscription provisoire sous huit jours, ainsi que la prise en charge de ses frais sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

TA Versailles, 10 sept. 2025, n° 2510404 – Lire en ligne

Le cadre juridique de l’accès en Master rappelé :

Le juge rappelle les conditions cumulatives du référé-suspension (art. L. 521-1 CJA) : urgence et moyen propre à créer un doute sérieux. En application de l’article L. 522-3 CJA, la requête peut être rejetée sans audience si l’urgence fait défaut ou si elle apparaît manifestement mal fondée.
Côté enseignement supérieur, les articles L. 612-1 et L. 612-6 du code de l’éducation encadrent l’accès au deuxième cycle (grade de master), avec capacités d’accueil et sélection sur dossier/concours. En cas de refus répétés, le dispositif de « droit au master » (art. R. 612-36-3) permet la saisine du recteur pour des propositions d’admission alternatives.

Les arguments de l’étudiante :

Mme B invoquait l’urgence au motif que le refus l’empêcherait de poursuivre ses études, compromettrait son projet d’accès à la profession d’avocat et rompt la continuité de son cursus, après 28 candidatures infructueuses déposées via « mon master ».

L’appréciation du juge des référés

  • Absence d’atteinte grave et immédiate : la décision contestée n’interrompt pas un cycle en cours mais concerne l’entrée dans un nouveau cycle sélectif (M1).
  • Capacités d’accueil et sélection : le conseil d’administration de Paris-Saclay a fixé à 90 le nombre de places en M1 Droit privé pour 2025-2026, avec critères de sélection (résultats L1-L3, progression, matières à TD, motivation). Mme B n’apporte aucun élément sur ses résultats et figurait 250e en liste d’attente, ce qui ne révèle pas une chance sérieuse d’admission.
  • Voies alternatives : l’intéressée peut saisir le recteur au titre du dispositif de l’article R. 612-36-3 (« droit au master ») pour obtenir des propositions compatibles avec son projet.

Dans ces conditions, l’exécution de la décision ne porte pas, par elle-même, une atteinte grave et immédiate à la situation de Mme B : l’urgence fait défaut.

La décision rendue :

La requête est rejetée en toutes ses conclusions selon la procédure de l’article L. 522-3 CJA. Les demandes d’injonction et de frais sont également écartées :

« Toutefois, d’une part, la décision attaquée n’a pas pour effet de faire obstacle à la poursuite d’un cycle universitaire déjà engagé mais uniquement à l’engagement d’un nouveau cycle diplômant, dont l’accès est, pour la plupart des formations, subordonné au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat. A ce titre, il résulte de l’instruction, que par une délibération n°CA-2024-063 du 17 décembre 2024, publiée au recueil des actes administratifs de l’université Paris-Saclay accessible librement sur le site internet de cette université, que son conseil d’administration a fixé, pour l’année universitaire 2025-2026, à 90 places la capacité d’accueil maximale pour le master 1 – droit privé et subordonné l’admission dans cette formation à un examen du dossier du candidat avec pour critères de sélection « les résultats en L1 L2 L3, la validation en première session, la progression des résultats, les résultats dans les matières à TD, la lettre de motivation et la motivation » du candidat. Mme B, qui ne produit aucun élément sur son parcours universitaire antérieur, notamment aucun élément sur ses notations, ne justifie pas de ce que la décision attaquée la priverait d’une chance sérieuse d’accéder à cette formation alors qu’il est constant qu’elle n’a été classée par le jury d’admission que 250ème sur liste d’attente pour le M1 droit privé de l’université Paris-Saclay. D’autre part, Mme B ne peut sérieusement soutenir qu’elle serait empêchée de poursuivre des études universitaires ou de réaliser son projet professionnel alors qu’il lui est notamment loisible, ainsi que l’indique d’ailleurs la décision attaquée, de saisir le recteur de la région académique sur le fondement de l’article R. 612-36-3 du code de l’éducation afin qu’il lui propose une inscription dans une formation du deuxième cycle en tenant compte de son projet professionnel. Par suite, il ne résulte pas de l’instruction que l’exécution de la décision attaquée porte par elle-même une atteinte grave et immédiate à la situation de la requérante ou à ses intérêts. Ainsi, la condition d’urgence exigée par les dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut être regardée comme remplie. »

À retenir :

Le référé-suspension contre un refus d’entrée en M1 suppose de démontrer une urgence concrète et actuelle. L’absence d’éléments objectifs sur le dossier académique, un rang très éloigné en liste d’attente et l’existence du « droit au master » géré par le recteur conduisent à l’écartement de l’urgence, sans examen du doute sérieux.

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