Mesures conservatoires : le juge des référés refuse de suspendre l’interdiction d’accès provisoire à l’université
Le 11 septembre 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande d’un étudiant visant à suspendre, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, l’interdiction d’accès de 30 jours prononcée par le président de l’université de Toulon.
TA Toulon, juge des référés, ord., 11 sept. 2025 – Lire en ligne
Les faits à l’origine de l’affaire :
Par décision du 27 août 2025, le président de l’université de Toulon a interdit à M. A, pour 30 jours, l’accès aux enceintes et locaux de l’établissement sur ses différents sites, hors bibliothèques universitaires (SCBT), service de santé étudiante (SSE), services de la vie étudiante et locaux du CROUS. L’étudiant, qui prépare le CAPES et invoque la reprise des cours fondamentaux dès le 10 septembre, a saisi en urgence le juge des référés pour obtenir la suspension de cette mesure de police interne.
L’argumentation de l’étudiant :
M. A soutenait notamment que :
– l’urgence était caractérisée par la reprise des enseignements et l’impact psychologique de la mesure ;
– la décision reposait sur des faits anciens, imprécis et généraux, étayés par des témoignages d’étudiants qu’il juge insincères ;
– la mesure était disproportionnée et constitutive de harcèlement, prise en représailles à une plainte déposée contre des enseignants, avec un conflit d’intérêts du président ;
– les alternatives proposées pour assurer la continuité pédagogique étaient défaillantes ;
– plusieurs libertés fondamentales étaient gravement et manifestement atteintes (aller et venir, vie privée et familiale, éducation, égalité devant l’instruction, santé, environnement sûr et respectueux de la santé mentale, réputation, dignité, liberté d’expression).
La position du tribunal :
Rappelant le cadre du référé-liberté (article L. 521-2 du code de justice administrative) et les pouvoirs de police du président d’université en matière d’ordre et de sécurité (articles R. 712-1, R. 712-6 et R. 712-8 du code de l’éducation), le juge souligne que les mesures doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à des risques avérés de désordre.
Le 9 septembre 2025, une première requête identique du même étudiant avait déjà été rejetée, le juge ayant alors estimé qu’au regard des faits reprochés (dont certains établis), du caractère limité dans le temps et l’espace de l’interdiction, et des mesures de continuité pédagogique mises en place, aucune atteinte grave et manifestement illégale aux libertés invoquées n’était caractérisée.
Saisi à nouveau, le juge constate que les éléments nouveaux produits (extraits de SMS d’étudiants manifestant aide ou empathie) ne suffisent pas à démontrer que la mesure litigieuse porterait une atteinte manifestement grave et illégale à une liberté fondamentale.
La décision rendue :
Le juge des référés rejette la requête de M. A sur le fondement de l’article L. 522-3 du code de justice administrative. Les demandes accessoires (levée de l’anonymat des témoins, publication de l’ordonnance sur le site de l’université, frais) sont également rejetées :
« Par ordonnance n° 2503575 du 9 septembre 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête de M. A, présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, dont les conclusions et les moyens étaient identiques à ceux mentionnés dans la présente requête, parce qu’il a considéré que le président de l’université n’avait pas, en prenant la mesure conservatoire contestée, porté une atteinte manifestement illégale notamment à la liberté d’aller et venir du requérant, et aux autres droits et libertés visés dans ses écritures, compte-tenu des faits reprochés, dont certains étaient établis, du caractère limité dans le temps et dans l’espace de la décision contestée, et des mesures de continuité pédagogique mises en place pour permettre au requérant de poursuivre sa scolarité. Si M. A produit des pièces nouvelles à l’appui de sa deuxième requête, constituées par des extraits de conversations par SMS avec des étudiants, qui lui demandent ou lui fournissent une aide, ou font preuve de bienveillance et d’empathie à son égard, ces éléments ne démontrent pour autant pas que la mesure contestée porte une atteinte manifestement grave et illégale aux droits et libertés du requérant. Par suite, les conclusions de la requête peuvent être rejetées sur le fondement de l’article L. 522-3 du code de justice administrative. »
Que retenir de cette décision ?
Le contrôle du juge des référés sur une interdiction d’accès universitaire de courte durée s’opère au prisme de l’évidence exigée par le référé-liberté : en présence d’éléments factuels justifiant des risques de désordre, d’une mesure strictement limitée et de dispositifs de continuité pédagogique, l’atteinte grave et manifestement illégale n’est pas caractérisée. La réitération d’une requête identique après un premier rejet n’est recevable qu’à la condition d’apporter de véritables éléments nouveaux de nature à modifier l’appréciation portée sur l’urgence et l’atteinte alléguée aux libertés fondamentales.
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