Aller au contenu
Accueil » Publications » Création d’une classe préparatoire en établissement privé : La compétence appartient au Ministre

Création d’une classe préparatoire en établissement privé : La compétence appartient au Ministre

Création d’une nouvelle CPGE : la décision appartient au ministre

Le tribunal administratif a annulé, le 3 octobre 2025, les décisions de la rectrice de l’académie de Lille qui avaient refusé à l’Institution Saint-Jean de Douai l’ouverture d’une nouvelle division de classe préparatoire économique et commerciale en première année. Le juge a estimé que la rectrice était incompétente pour prendre une telle décision, qui relève exclusivement du ministre, et a relevé en outre un vice de procédure.

TA Lille, 8e ch., 3 oct. 2025, n° 2206403 – Lire en ligne

Le contexte de la création de la classe préparatoire :

L’Institution Saint-Jean de Douai, établissement privé sous contrat, accueille déjà plusieurs classes préparatoires économiques et commerciales. En 2021, l’établissement a sollicité la création d’une division supplémentaire en première année.

Par courrier du 2 novembre 2021, la rectrice a rejeté cette demande, estimant que l’offre était suffisante dans l’académie. Un recours gracieux formé en janvier 2022 a également été rejeté. L’association gestionnaire de l’établissement a alors saisi le tribunal administratif.

Les arguments de l’établissement privé :

L’Institution Saint-Jean invoquait notamment :

  • l’incompétence de la rectrice, la décision relevant du ministre chargé de l’éducation nationale (art. D. 612-24 du code de l’éducation) ;
  • l’absence de saisine du comité régional académique et d’autres instances consultatives, constituant un vice de procédure ;
  • une motivation insuffisante et une erreur d’appréciation des besoins réels dans la filière « économie et commerce » ;
  • une atteinte à la liberté d’association.

L’analyse du tribunal :

Le juge a tout d’abord écarté les fins de non-recevoir soulevées par la rectrice : l’association de l’Institution Saint-Jean avait bien qualité pour agir et les courriers litigieux avaient un caractère décisoire, non de simples informations.

Sur le fond, le tribunal a rappelé que la création d’une division de CPGE relève de la compétence du ministre chargé de l’éducation nationale, et non de la rectrice. En rejetant elle-même la demande, sans transmission au ministre, la rectrice a excédé sa compétence.

En outre, le tribunal a relevé que les instances prévues par le code de l’éducation (comité régional académique, conseil académique, etc.) n’avaient pas été saisies, ce qui constitue un vice de procédure ayant privé l’établissement d’une garantie.

La décision du tribunal :

Le tribunal administratif a :

  • annulé les décisions de la rectrice des 2 novembre 2021 et 27 janvier 2022 ;
  • enjoint à la rectrice de réexaminer la demande de l’Institution Saint-Jean dans un délai de deux mois ;
  • condamné l’État à verser 1 500 euros à l’association au titre des frais de justice :

« il résulte des dispositions citées au point 6 que le ministre chargé de l’éducation est compétent pour décider de la création des divisions destinées à accueillir les étudiants de classes préparatoires aux grandes écoles dans les établissements relevant de sa compétence, dont font partis les établissements privés sous contrat d’association avec l’État.

Ainsi qu’il a été dit au point 7, la rectrice de l’académie de Lille a expressément rejeté la demande de l’Institution Saint-Jean tendant à l’ouverture d’une nouvelle division en première année de CPGE filière économique et commerciale, pour l’année universitaire 2022-2023, sans transmettre cette proposition au ministre en charge de l’éducation nationale, seul compétent pour décider de la création d’une division destinée à accueillir les étudiants en CPGE conformément aux dispositions de l’article D. 612-24 du code de l’éducation. Il en résulte que les décisions des 2 novembre 2021 et 27 janvier 2022 en tant qu’elles refusent la création d’une nouvelle division en première année de CPGE au sein de l’Institution Saint-Jean ont été prises par une autorité incompétente.

D’autre part, et au surplus, il ne ressort pas des pièces du dossier que le comité régional académique, la région, le comité technique et le conseil académique de l’éducation nationale auraient été saisis pour émettre un avis sur la demande de création d’une nouvelle division de CPGE au sein du lycée Saint-Jean, conformément aux dispositions précitées de l’article D. 612-24 du code de l’éducation. Dans ces conditions, les décisions en litige sont entachées d’un vice de procédure, ayant privé l’association de l’Institution Saint-Jean d’une garantie.

Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, que l’association de l’Institution Saint-Jean est fondée à demander l’annulation de la décision du 2 novembre 2021 en tant qu’elle rejette la demande de création d’une nouvelle division en classe préparatoire aux grandes écoles, filière « économie et commerce », en première année, ainsi que la décision du 27 janvier 2022 portant rejet du recours gracieux. »

À retenir en matière d’établissement privé :

Cette décision illustre la compétence exclusive du ministre pour statuer sur la création des classes préparatoires aux grandes écoles. Les rectorats ne peuvent qu’émettre des propositions, et toute décision directe de refus est entachée d’incompétence.

Retrouvez nos autres articles sur les établissements privés d’enseignement en cliquant ici.