Droits de première inscription dans les établissements français à l’étranger : un arrêt favorable aux personnels résidents
La cour administrative d’appel a été saisie d’un litige opposant un enseignant résident détaché auprès de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) à cette dernière. Le requérant demandait le remboursement de plus de 73 000 euros correspondant aux droits de première inscription de ses trois enfants au lycée français de A…, au D…. Après un premier rejet devant le tribunal administratif de Nantes, l’affaire a été portée en appel.
CAA Nantes, 6e ch., 14 oct. 2025, n° 24NT02303 – Lire en ligne
Les faits et la procédure :
M. B…, enseignant détaché comme résident auprès de l’AEFE entre 2015 et 2018, avait inscrit ses trois enfants au lycée français de A… pour l’année scolaire 2015-2016. Il s’était acquitté de 570 000 bolivares fuertes au titre des droits de première inscription, avant que cette somme ne lui soit remboursée, puis immédiatement reversée par lui-même à l’établissement. En 2019, il réclame à l’AEFE le remboursement de ces droits, qu’il estime devoir percevoir en application du décret de 2002 et de ses arrêtés d’application. Sa demande a été rejetée par décision du 19 février 2020, puis par le tribunal administratif de Nantes en 2024.
Les arguments de l’enseignant :
En appel, le personnel enseignant soutenait notamment :
- qu’il n’avait pas bénéficié d’une exemption des droits de première inscription ;
- que l’AEFE avait mal appliqué le décret du 4 janvier 2002 relatif à la situation des personnels des établissements français à l’étranger ;
- que l’avantage familial (qui inclut ces droits) n’avait pas été correctement reconnu ;
- que le montant des droits devait être fixé selon l’arrêté du 16 décembre 2015, à hauteur de 73 203 euros pour ses trois enfants.
La défense de l’AEFE :
L’agence contestait la recevabilité de la demande et maintenait que le requérant avait été exempté du paiement, son remboursement en 2016 attestant selon elle de cette exonération. Elle estimait également que les premiers juges avaient correctement interprété les textes.
La décision de la cour :
La cour a d’abord écarté la fin de non-recevoir soulevée par l’AEFE, estimant que la demande n’était pas tardive. Sur le fond, elle a considéré que :
- bien que le remboursement de février 2016 ait pu s’analyser comme une décision d’exemption, le reversement immédiat par M. B… et l’absence de preuve de perception ultérieure rendaient sa créance justifiée ;
- l’avantage familial lui avait été reconnu, mais non la composante spécifique liée aux droits de première inscription, qui ne sont versés qu’une seule fois à l’entrée dans l’établissement ;
- le montant dû était bien de 73 203 euros, selon l’arrêté en vigueur pour l’année 2015-2016.
En conséquence, la cour a annulé le jugement de première instance et condamné l’AEFE à verser au requérant la somme réclamée, assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2019. L’agence a également été condamnée à 1 500 euros au titre des frais de justice :
Il résulte de ce qui précède que M. B… est fondé à soutenir qu’il appartenait à l’AEFE de lui verser le montant des droits de première inscription pour ses trois enfants auprès E… » de A…, au D… au titre de l’année scolaire 2015-2016, alors qu’il bénéficiait d’une décision d’exemption concernant leur paiement.
En ce qui concerne le montant de la somme réclamée :
« Il résulte de l’instruction, en particulier de l’arrêté du 16 décembre 2015 modifiant l’arrêté du 5 février 2008 pris en application du décret du 4 janvier 2002 relatif à la situation administrative et financière des personnels des établissements d’enseignement français à l’étranger – arrêté en vigueur du 1er septembre 2015 jusqu’au 31 août 2016 – et de l’annexe 2015-2016 qui l’accompagne, que le montant des droits de première inscription des enfants dans un établissement situé au D… s’élevait, pour la période en cause, à 43 922 euros, pour les enfants de moins de 10 ans, à 29 281 euros pour les enfants de 10 à 15 ans et à 14 641 euros pour les enfants de plus de 15 ans. Sur ces bases, M. B… dont les enfants sont nés respectivement le 27 mars 2000, le 27 mars 2004 et le 25 juillet 2005 pouvait ainsi prétendre à recevoir, au titre des droit de première inscription pour la période 2015-2016 une somme totale de 73 203 euros. Il est, en conséquence, fondé à obtenir la condamnation de l’AEFE à lui payer la somme de 73 203 euros qu’il demande.
En ce qui concerne les intérêts :
Compte tenu de ce qui a été indiqué aux points précédents, M. B… a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 73 203 euros à compter du 20 décembre 2019, ainsi qu’il le demande, somme mise à la charge de l’AEFE.
Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que M. B… est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’agence pour l’enseignement français à l’étranger à lui verser la somme de 73 203 euros. »
Portée de l’arrêt :
Cet arrêt confirme que les droits de première inscription constituent une composante distincte de l’avantage familial, et que leur remboursement peut être exigé par un agent résident lorsqu’ils ont été effectivement acquittés, même en cas de pratiques administratives locales ambiguës. Il illustre l’importance pour les personnels de l’AEFE d’exiger une application stricte des arrêtés fixant les montants de l’avantage familial.
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