RĂ©partition des dĂ©penses d’enseignement entre collectivitĂ©s territoriales – Jurisprudence
Par une dĂ©cision du 3 janvier 2023, le tribunal administratif de Bastia a rendu un jugement intĂ©ressant en matiĂšre de rĂ©partition des frais de fonctionnement relatifs Ă l’accueil par une commune d’enfants rĂ©sidents au sein d’une autre collectivitĂ©.
TA Bastia, 1re ch., 3 janv. 2023, n° 2001049
Les faits Ă l’origine de l’affaire :
« une partie des enfants rĂ©sidant dans la commune dâAlbitreccia frĂ©quente lâĂ©cole maternelle et Ă©lĂ©mentaire situĂ©e dans la commune voisine de Pietrosella.
Le centre communal dâaction sociale de Pietrosella a Ă©mis le 29 juillet 2020 Ă lâencontre de la commune dâAlbitreccia un titre exĂ©cutoire dâun montant de 18âŻ983 euros correspondant Ă sa participation aux dĂ©penses de cantine scolaire. »
La commune dâAlbitreccia a demandĂ© lâannulation de lâavis de sommes Ă payer valant titre exĂ©cutoire.
Le cadre légal applicable et la rÚgle de droit à retenir :
L’article L. 212-8 du code de l’Ă©ducation prĂ©cise Ă propos de l’accueil des enfants dans les Ă©coles maternelles et Ă©lĂ©mentaires :
« Lorsque les Ă©coles maternelles ou les Ă©coles Ă©lĂ©mentaires publiques dâune commune reçoivent des Ă©lĂšves dont la famille est domiciliĂ©e dans une autre commune, la rĂ©partition des dĂ©penses de fonctionnement se fait par accord entre la commune dâaccueil et la commune de rĂ©sidence. (…)
A dĂ©faut dâaccord entre les communes intĂ©ressĂ©es sur la rĂ©partition des dĂ©penses, la contribution de chaque commune est fixĂ©e par le reprĂ©sentant de lâEtat dans le dĂ©partement aprĂšs avis du conseil dĂ©partemental de lâĂ©ducation nationale.
Pour le calcul de la contribution de la commune de rĂ©sidence, il est tenu compte des ressources de cette commune, du nombre dâĂ©lĂšves de cette commune scolarisĂ©s dans la commune dâaccueil et du coĂ»t moyen par Ă©lĂšve calculĂ© sur la base des dĂ©penses de lâensemble des Ă©coles publiques de la commune dâaccueil. Les dĂ©penses Ă prendre en compte Ă ce titre sont les charges de fonctionnement, Ă lâexclusion de celles relatives aux activitĂ©s pĂ©riscolaires (…) ».
Ainsi, « lorsque des enfants sont scolarisĂ©s dans une commune autre que leur commune de rĂ©sidence, les dĂ©penses de fonctionnement liĂ©es aux activitĂ©s dâenseignement supportĂ©es par la commune dâaccueil sont rĂ©parties par accord entre les deux collectivitĂ©s ou, Ă dĂ©faut, par dĂ©cision du reprĂ©sentant de lâEtat dans le dĂ©partement. Les dĂ©penses relatives aux activitĂ©s pĂ©riscolaires, incluant les dĂ©penses liĂ©es Ă la cantine, eu Ă©gard au caractĂšre facultatif de ce service public, ne sont pas au nombre des charges de fonctionnement de lâĂ©cole publique liĂ©es aux activitĂ©s dâenseignement. »
Le juge administratif prĂ©cise que si les dĂ©penses de fonctionnement liĂ©es aux activitĂ©s dâenseignement supportĂ©es par la commune dâaccueil sont rĂ©parties par accord entre les deux collectivitĂ©s ou Ă dĂ©faut par le PrĂ©fet, les dĂ©penses relatives aux activitĂ©s pĂ©riscolaires y compris la cantine scolaire, eu Ă©gard au caractĂšre facultatif de ces services publics, ne constituent pas des charges de fonctionnement liĂ©es aux activitĂ©s d’enseignement. Ces dĂ©penses n’ont donc pas a ĂȘtre supportĂ©es, sauf accord, par la collectivitĂ© qui bĂ©nĂ©ficie de l’accueil de ses rĂ©sidents.
L’application au cas d’espĂšce :
Le juge qualifie d’abord le service public concernĂ© par le titre exĂ©cutoire :
« Le titre exĂ©cutoire Ă©mis le 29 juillet 2020 correspond Ă la participation de la commune dâAlbitreccia pour les frais de cantine des enfants, activitĂ© qui, ainsi quâil a Ă©tĂ© dit au point prĂ©cĂ©dent, est organisĂ©e dans le cadre dâun service public facultatif. »
Ainsi, ces dĂ©penses n’avaient pas a ĂȘtre obligatoirement rĂ©parties entre les deux collectivitĂ©s : « Ces dĂ©penses nâentrent donc pas dans les charges de fonctionnement de lâĂ©cole, au sens de lâarticle L. 212-8 du code de lâĂ©ducation.’
Ensuite, le juge administratif recherche si un accord existait entre les deux collectivités :
« Contrairement Ă ce que soutient la commune de Pietrosella, il ne rĂ©sulte pas de lâinstruction quâil existerait un accord verbal pour que la commune dâAlbitreccia prenne Ă sa charge les frais de restauration scolaire de ses Ă©lĂšves scolarisĂ©s dans lâĂ©cole de Pietrosella pour lâannĂ©e scolaire 2019-2020. »
Aucun accord, mĂȘme verbal, n’est retenu par le juge administratif. L’anciennetĂ© de cet accueil et l’existence d’un paiement dĂ©jĂ effectuĂ© n’emportent pas plus la conviction du juge administratif :
« A cet Ă©gard, la circonstance que la commune dâAlbitreccia acquitte depuis 1991 les frais de restauration des enfants scolarisĂ©s dans la commune voisine de Pietrosella ne saurait prouver lâexistence dâun accord verbal au-delĂ de lâannĂ©e pour laquelle le paiement est effectuĂ© suite Ă une demande en ce sens de la commune de Pietosella. «Â
Le titre exécutoire est donc annulé :
En consĂ©quence, le juge administratif ne peut que relever que l’accueil des enfants dans le cadre de ce service public facultatif n’est pas une charge de fonctionnement qui doit ĂȘtre obligatoirement rĂ©partie entre les deux collectivitĂ©s en application de l’article L. 212-8 du code de l’Ă©ducation et que faute d’accord entre les communes, le titre exĂ©cutoire est dĂ©pourvu de base lĂ©gale :
« Par suite, Ă dĂ©faut dâaccord de la commune dâAlbitreccia sur la prise en charge de ces frais, le titre exĂ©cutoire Ă©mis le 29 juillet 2020 par le maire de la commune de Pietrosella est dĂ©pourvu de base lĂ©gale et doit ĂȘtre annulĂ©. »