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Discipline des lycéens : Exclusion définitive du lycée pour des photomontages antisémites

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Exclusion définitive du lycéen auteur de photomontages antisémites sur les réseaux sociaux :

La Cour administrative de Bordeaux vient de rendre un récent arrêt en matière de discipline des lycéens. Cet arrêt vient annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux qui avait prononcé l’annulation de la sanction d’exclusion définitive prononcée à l’encontre d’un lycéen auteur de photomontages antisémites partagés sur les réseaux sociaux.

CAA de BORDEAUX, 1ère chambre, 23 février 2023, 21BX00896, Inédit au recueil Lebon

Le conseil de discipline du lycée peut être saisi de faits graves :

Le jeune en lycée professionnel avait produit « deux photomontages, le premier représentant un chat affublé d’une croix gammée et d’une petite moustache évoquant Adolf Hitler, la seconde, non produite (…), présentant la tête d’un élève de sa classe au centre d’une assiette de frites, portant la légende « on mange le führer » »

Ces photomontages ont été diffusés auprès d’un « groupe privé réunissant 15 des 16 élèves de la classe, le seul élève non inclus dans le groupe étant de confession juive ».

La motivation identique d’une mesure conservatoire et d’une sanction disciplinaire ne suffit pas en elle-même à caractériser un défaut de motivation :

La Cour administrative d’appel va d’abord statuer sur la régularité du jugement rendu en 1ère instance et annuler celui-ci :

« La décision attaquée vise les articles applicables du code de l’éducation ainsi que ceux du règlement intérieur du lycée professionnel Flora Tristan.

Elle rappelle le motif de la sanction infligée A le conseil de discipline de cet établissement et fait état de l’implication personnelle de l’intéressé dans l’échange sur un réseau social de photographies et de photomontages exposant des élèves et des professeurs en utilisant les images d’Hitler, de la croix gammée et du salut hitlérien en violation du règlement intérieur de l’établissement et qualifiées comme présentant un caractère outrageant, à l’égard de membres de la communauté éducative. Elle comporte ainsi, de manière suffisamment précise, l’énoncé des considérations de droit et de fait en constituant son fondement pour permettre à l’intéressé de comprendre et de contester utilement la sanction prononcée.

La circonstance, à la supposer établie, que cette motivation serait identique à celles des sanctions prononcées à l’encontre d’autres élèves ayant commis les mêmes faits n’est pas de nature à caractériser l’insuffisance de la motivation de la décision concernant l’élève Thibault B. Dès lors, le ministre de l’éducation national est fondé à soutenir que c’est à tort que A le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision au motif qu’elle était insuffisamment motivée. »

La mesure conservatoire et l’absence de respect du principe de continuité pédagogique ne sont pas une sanction disciplinaire :

De manière traditionnelle, le juge administratif rappelle que la mesure conservatoire n’est pas une sanction disciplinaire et que l’absence de respect du principe de continuité pédagogique ne suffit pas à caractériser une irrégularité susceptible d’affecter la sanction :

« D’une part, les circonstances que l’établissement aurait refusé de transmettre les cours durant la période de mise en œuvre de la mesure conservatoire et que le chef d’établissement aurait pris attache avec un autre établissement pour trouver une place au jeune E B afin d’assurer la continuité de sa scolarisation ne sauraient suffire à elles seules à établir que la décision d’exclusion définitive aurait été prise avant la tenue du conseil de discipline ainsi que le soutiennent les requérants. A ailleurs, à la supposer même établie, l’irrégularité de la notification de la mesure conservatoire est sans incidence sur la légalité de la décision du 28 janvier 2019.

D’autre part, cette interdiction d’accès d’une durée de seize jours qui ne constitue que la mesure conservatoire prévue A les dispositions précitées du code de l’éducation ne présente pas le caractère d’une sanction. Les requérants ne sauraient utilement se prévaloir à cet égard du livret conseils sur la procédure disciplinaire élaboré A le rectorat de Dijon qui n’a pas de valeur règlementaire. A suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision contestée sanctionnerait l’intéressé une deuxième fois pour les mêmes faits en méconnaissance du principe « non bis in idem » ou qu’elle constituerait une sanction déguisée. »

La participation active de l’élève et l’absence de circonstance atténuante relevées par le juge administratif :

« La circonstance que l’un des deux photomontages aurait été publié A l’intéressé en réaction à la publication d’une photographie dans laquelle il apparait lui-même grimé avec une moustache rappelant celle d’Adolf Hitler ne saurait ôter aux faits leur caractère de gravité alors en outre qu’il ressort de ce compte rendu que les élèves de cette classe ont fait l’objet d’une mise en garde l’année précédente à la suite de propos antisémites tenus à l’encontre de l’un de leur camarade de confession juive. »

L’exclusion définitive du lycée professionnel confirmée en appel :

« Dans ces conditions, eu égard à la gravité des faits commis A le jeune E B en méconnaissance des dispositions précitées du règlement intérieur, le recteur de l’académie de Bordeaux, en prononçant à l’encontre de M. E B la sanction d’exclusion définitive sans sursis, n’a pas commis d’erreur d’appréciation ni méconnu les principes d’individualisation et de proportionnalité des sanctions. »

La Cour administrative d’appel de Bordeaux annule donc le jugement rendu par le tribunal administratif de Bordeaux et confirme la sanction prise par le Recteur à la suite de la commission académique d’appel.

CAA Bordeaux, 1re ch. – formation à 3, 23 févr. 2023, n° 21BX00896

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