Annulation d’une sanction disciplinaire portant exclusion d’une durée de 3 ans de l’établissement
Le tribunal administratif de Toulouse vient de prononcer l’annulation d’une sanction disciplinaire infligée à un étudiant injustement accusé de violences sexuelles et d’avoir porté atteinte au bon fonctionnement de son établissement d’enseignement supérieur.
TA Toulouse, 18 janvier 2024, n° 2302299
Les faits à l’origine de la décision du tribunal :
Dans cette affaire, l’étudiant qui avait entretenu une brève relation avec une autre étudiante avait été accusé par cette dernière de viol. Ces faits avait donné lieu au dépôt d’une plainte devant le Procureur de la République, plainte qui avait été classée sans suite, les faits n’ayant pu être clairement établis par l’enquête.
Conformément aux dispositions de l’article R. 811-11 du code de l’éducation, l’étudiant s’était vu reprocher devant la commission disciplinaire de l’université : « le fait de ne pas [avoir pris] en compte la situation de vulnérabilité matérielle et psychologique » et « sa propre perception de [la] relation » mais également d’avoir participé à des « pressions et menaces » « envers ses pairs » et ainsi d’avoir porté atteinte au bon fonctionnement de l’établissement.
L’étudiant s’était vu infliger une sanction disciplinaire portant exclusion de l’établissement pour une durée de trois ans.
La position du juge administratif :
Le tribunal administratif va d’abord relever que les faits dénoncés n’ont pas donné lieu à une poursuite devant le juge pénal :
« Il ressort des pièces du dossier que Mme C., étudiante au sein de l’Institut d’études politiques, avec laquelle M. Y a entretenu une brève relation, a déposé plainte le 9 novembre 2022 pour viol à l’encontre de ce dernier pour des faits survenus pendant leur relation. Cette plainte a donné lieu, le 28 novembre 2022, à un classement sans suite du procureur de la République, les faits ou les circonstances des faits de la procédure n’ayant pu être clairement établis par l’enquête et les preuves n’étant pas suffisantes pour que l’infraction soit constituée. Si, selon notamment certains témoignages recueillis, Mme C. a fait part de son mal être à la suite de sa relation avec M. Y, évoquant des actes sexuels non consentis, et qu’en janvier 2022, elle a souhaité changer de groupe de travaux dirigés, la commission ne pouvait toutefois pas reprocher au requérant « le fait de ne pas [avoir pris] en compte la situation de vulnérabilité matérielle et psychologique » et« sa propre perception de [la] relation » qu’il a eue avec Mme C., de tels motifs relevant d’une appréciation subjective des faits reprochés. »
Le tribunal administratif va ensuite porter son contrôle sur les atteintes au bon fonctionnement de l’établissement qui peuvent être reprochées à l’étudiant :
« Par ailleurs, l’administration n’établit pas davantage les « pressions et menaces » reprochés au requérant « envers ses pairs ». «
Enfin, le juge administratif va relever que le climat au sein de l’établissement consécutif au mouvement #SciencePorc a participé aux troubles affectant le bon fonctionnement :
« il ressort des pièces du dossier et, notamment du rapport d’instruction du 26 février 2023, que M. Y n’a pas contribué à rendre publique sa relation avec Mme C., les perturbations mentionnées dans la décision attaquée semblant davantage résulter du mouvement de dénonciation publique et de sensibilisation aux enjeux de violences sexuelles et sexistes mené par plusieurs associations d’étudiants, notamment par la voie d’un tract critiquant la décision de la commission de discipline du 5 septembre 2022 qui avait rejeté les poursuites disciplinaires à l’encontre du requérant, « malgré la vague Science Porc », et qualifiant ce dernier de « potentiel agresseur ». Au demeurant, le 28 novembre 2022, M. Y a déposé une plainte, toujours pendante, pour « harcèlement scolaire », laquelle a été réitérée le 15 février 2023 au vu de ce mouvement de dénonciation publique. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. Y aurait eu un comportement qui aurait porté atteinte à l’ordre et au bon fonctionnement de l’établissement. »
Le juge prononce l’annulation de la sanction disciplinaire prononcée à l’encontre de l’étudiant :
« Par suite, la sanction d’exclusion de trois ans, qui affecte nécessairement la poursuite des études du requérant, présente un caractère disproportionné.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. Y est fondé à solliciter l’annulation de la décision du 17 avril 2023 de la commission de discipline de la section disciplinaire de l’Institut d’études politiques de Toulouse. »
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