Recrutement des MCF et garanties procédurales
Dans une décision rendue le 24 octobre 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé la délibération par laquelle le comité de sélection de l’université Paris I – Panthéon Sorbonne a écarté un candidature pour un poste de maître de conférences en droit international privé, en raison d’un défaut de motivation et d’irrégularités dans la procédure de recrutement. Le tribunal a rejeté la demande d’injonction de M. B visant à obtenir sa nomination directe.
Cette affaire soulève des questions importantes relatives au respect des garanties procédurales dans les processus de recrutement universitaire.
TA Paris, 5e sect. – 2e ch., 24 octobre 2024, n° 2223637.
Le candidat n’avait pas été auditionné
Maître de conférences à l’université Paris-Est Créteil, M. B s’était porté candidat au poste de maître de conférences à l’université Paris I – Panthéon Sorbonne. Le comité de sélection ayant décidé de ne pas auditionner sa candidature, le candidat a saisi le tribunal administratif pour obtenir l’annulation de cette décision.
Les arguments développés par le candidat
Le candidat malheureux soutenait que plusieurs irrégularités avaient entaché la décision du comité de sélection :
- Insuffisance de motivation dans la décision de non-audition, celle-ci se contentant de mentionner un « bon dossier, mais en retrait par rapport aux autres candidatures » sans précision des critères d’évaluation.
- Manquement aux règles de quorum et absence de démonstration que le comité de sélection aurait effectivement délibéré, en méconnaissance des principes d’égalité de traitement et de transparence.
- Manque d’impartialité et d’objectivité dans l’évaluation des candidatures, le comité ayant, selon lui, dénigré sa candidature.
- Non-respect des dispositions de l’article L. 952-6-1 du code de l’éducation, en raison d’une composition irrégulière du comité de sélection.
- Discrimination liée à l’âge et dénigrement de son parcours académique, estimant que sa candidature avait été écartée de manière arbitraire.
L’analyse du tribunal sur la procédure de recrutement
1. Sur l’insuffisance de motivation de la décision de non-audition
Le tribunal a rappelé que, selon l’article 9-2 du décret du 6 juin 1984, le comité de sélection est tenu de motiver ses décisions concernant les candidats non retenus. En l’espèce, le tribunal a estimé que la mention « bon dossier, mais en retrait » ne constituait pas une motivation suffisante et privait M. B des garanties procédurales nécessaires. Ce manquement rend donc la délibération irrégulière et justifie son annulation.
2. Sur l’irrecevabilité des conclusions tendant à l’annulation de la décision de recrutement
M. B n’ayant pas produit la décision portant recrutement, malgré une demande de régularisation, le tribunal a jugé ses conclusions irrecevables pour défaut de production de l’acte attaqué, en application de l’article R. 412-1 du code de justice administrative. Cette oubli de communication a eu importance certaine puisque le tribunal administratif n’a pas pu censurer en totalité l’Université pour son recrutement irrégulier.
3. Sur les conclusions tendant à une injonction de nomination
Le tribunal a estimé que l’annulation de la délibération n’entraînait pas nécessairement la nomination directe de M. B. La procédure de recrutement étant par ailleurs close avec la nomination définitive d’un autre candidat, il n’y avait pas lieu d’enjoindre à l’université de reprendre la procédure.
L’annulation de la délibération du comité de sélection
En l’absence de motivation suffisante de la décision de non-audition, le tribunal administratif a annulé la délibération du comité de sélection écartant la candidature de M. B et la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Les autres demandes de M. B ont été rejetées en raison de l’irrecevabilité de ses conclusions concernant la décision de recrutement.
Extrait de la décision :
« Il ressort des pièces des dossiers que, pour motiver sa décision de ne pas auditionner M. B, le comité de sélection de l’université Paris I – Panthéon Sorbonne s’est borné à mentionner : « bon dossier, mais en retrait par rapport aux autres candidatures », sans indiquer, même sommairement, les raisons pour lesquelles il estimait que sa candidature était en retrait par rapport aux autres. Par suite, M. B est fondé à soutenir que l’avis du comité de sélection est insuffisamment motivé et à en demander l’annulation ainsi que par voie de conséquence, la délibération du comité de sélection écartant sa candidature et la décision implicite de rejet issue de son recours gracieux en date du 16 juillet 2022.
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision portant recrutement sur le poste n° 4724 :
Aux termes de l’article R. 412-1 du code de justice administrative : « La requête doit à peine d’irrecevabilité être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l’acte attaqué, ou, dans le cas mentionné à l’article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date du dépôt de la réclamation ».
En dépit de la demande de régularisation qui lui a été adressée par le greffe du tribunal administratif, M. B n’a pas produit, dans le délai qui lui était imparti, l’acte dont il demande l’annulation. Par suite, ses conclusions ne sont pas recevables.
Sur les conclusions à fins d’injonction :
Les motifs d’annulation du présent jugement n’implique pas la nomination de M. B sur le poste n° 4724. Par ailleurs, il résulte de l’instruction que la procédure de recrutement sur le poste n° 4724 à l’université Paris I – Panthéon Sorbonne a fait l’objet d’une décision de nomination devenue définitive. Les conclusions de M. B tendant à ce qu’il soit enjoint à cette université de reprendre la procédure de recrutement au stade de l’examen des demandes de mutation ne peuvent, par suite, qu’être rejetées. »
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